Ce n’est un secret pour personne, le continent africain manque cruellement d’établissements d’enseignement secondaire et supérieur. Selon les données de l’ISU, près de 60 % des adolescents âgés de 15 à 17 ans en Afrique subsaharienne ne sont pas scolarisés, et l’accès au niveau universitaire est encore plus restreint. En Côte d’Ivoire, seulement 2,8 % de la population âgée de 25 ans ou plus possède un baccalauréat ou un diplôme supérieur (selon la Banque mondiale), et des chiffres comme ceux-ci se retrouvent sur l’ensemble du continent : en République Démocratique du Congo, seulement 3,8 % de la population ont un diplôme de l’enseignement supérieur, 1,6 % au Mali et 2,3 % au Rwanda. Même en Afrique du Sud, l’un des pays les plus riches du continent en termes de PIB par habitant, seulement 6,1 % de la population âgée de 25 ans et plus est titulaire d’un diplôme universitaire. L’écart est criant par rapport à d’autres pays du monde comme les États-Unis où 33,4 % détiennent un diplôme similaire ou encore au Venezuela, à l’IDH moins élevé mais qui atteint quand même les 25,1 %. Cette pénurie gangrène l’économie et le développement du continent, mais les modèles d’enseignement traditionnels importés d’Occident ne suffisent pas à combler ce manque. Bon nombre des cerveaux les plus brillants d’Afrique effectuent leurs études supérieures en Amérique du Nord et en Europe, et la plupart ne reviennent jamais après avoir quitté l’Afrique.
Pour lutter contre cette fuite des cerveaux, l’entrepreneur Fred Swaniker a établi un réseau d’universités africaines de premier plan pour former les futurs décideurs politiques et commerciaux de l’Afrique de demain. Bien décidé à devenir le visage de l’enseignement supérieur africain, son African Leadership Academy élargit l’univers des possibles en apportant de nouvelles réponses aux lacunes du système universitaire du continent, en contournant le manque d’infrastructures et de ressources, tout en considérant sa jeunesse comme une force. Sans précédent historique, ALA a construit à partir de zéro un modèle complet d’enseignement supérieur. Toute la première année d’études est consacrée à l’acquisition de compétences non techniques clés et intangibles, comme le leadership, la communication écrite et orale et la prise de décisions à partir de données. Après cette première année, les étudiants choisissent de se concentrer sur une spécialité avec un modèle d’apprentissage collaboratif qui assemble enseignement en ligne et en présentiel. Les cours magistraux n’existent pas, les étudiants apprennent à leur propre rythme à l’aide du système en ligne de l’école tout en maintenant le contact face à face avec leurs pairs qui est essentiel à la collaboration et à l’apprentissage.
Le modèle intègre au programme d’études la nécessité de l’expérience professionnelle, en exigeant que quatre mois sur chaque année de premier cycle soient consacrés à des stages à travers le continent. Malgré la jeunesse du système (le premier campus de l’ALA a été créé en 2015), son approche originale pour former des leaders agiles est très prometteuse pour l’avenir de l’éducation supérieure, tant en Afrique que dans le reste du monde.